Les cellules CAR-T, un nouveau traitement pour les tumeurs du cerveau

Le Docteur Houillier est neuro-oncologue à la Pitié-Salpêtrière. Elle coordonne le réseau national des centres experts dédié aux lymphomes cérébraux, appelé LOC, labellisé par l’Institut national du cancer (INCa). Elle est pionnière dans l’utilisation des cellules CAR-T dans le traitement des lymphomes du cerveau.

À quoi correspondent les cellules CAR-T et comment agissent-elles contre les cellules tumorales ?

Il s’agit d’une forme particulière d’immunothérapie, donc d’un traitement qui renforce le système immunitaire du patient pour combattre plus efficacement le cancer. Ce traitement consiste dans un premier temps à prélever les lymphocytes T du patient, cellules qui appartiennent aux globules blancs et qui jouent un rôle important dans l’immunité. Ces cellules sont alors modifiées génétiquement au laboratoire pour qu’elles puissent reconnaître spécifiquement les cellules tumorales. Elles deviennent ainsi des cellules CAR-T (en anglais : Chimeric Antigen Receptor T-cells). Une fois créées, elles sont multipliées avant d’être réinjectées par voie intraveineuse chez les patients pour détruire les cellules tumorales.

Ce traitement a-t-il des effets secondaires ?

Les patients présentent presque tous dans les jours suivant l’injection des CAR-T un syndrome inflammatoire qui se manifeste essentiellement par une forte fièvre. Ils peuvent aussi présenter quelques jours plus tard des signes neurologiques, en particulier des difficultés d’écriture ou de la parole. Ces effets secondaires, de sévérité variable selon les patients, justifient une hospitalisation pour surveillance après la réinjection des CAR-T. Heureusement, les symptômes régressent en quelques jours sans séquelles dans la très grande majorité des cas.

Dans quelles maladies ce traitement est-il utilisé ?

Les cellules CAR-T sont une révolution en hématologie, en particulier dans le traitement des lymphomes et de certaines formes de leucémie. Elles ont permis de nombreuses guérisons définitives et sont couramment utilisées aujourd’hui.

Qu’en est-il pour les lymphomes du cerveau ?

Initialement, les lymphomes du cerveau étaient exclus des essais thérapeutiques des cellules CAR-T, en raison de la crainte d’exposer les patients souffrant d’une pathologie cérébrale à des effets secondaires neurologiques trop importants. Cependant, notre groupe français a montré que les cellules CAR-T pouvaient être utilisées dans les lymphomes cérébraux avec une tolérance tout à fait acceptable. De plus, nous avons observé des réponses fréquentes chez des patients qui étaient résistants à tous les traitements conventionnels. Aujourd’hui, nous utilisons les cellules CAR-T en routine dans les récidives, et nous préparons des essais cliniques pour voir si elles sont efficaces dès le traitement initial.

Qu’en est-il des autres tumeurs cérébrales ?

Pour les gliomes, et en particulier le glioblastome, la situation est plus complexe car les tumeurs sont plus hétérogènes sur le plan biologique et portent de nombreuses cibles possibles. L’une des difficultés rencontrées est l’identification de celles qui sont les plus pertinentes pour fabriquer les cellules CAR-T les plus efficaces. Nous sommes encore en phase d’expérimentation. Trois essais cliniques ont été récemment publiés par des équipes américaines, avec des cas de diminution du volume tumoral, ce qui est très encourageant. À la différence des lymphomes, le mode d’administration des cellules CAR-T se faisait préférentiellement par des injections dans le liquide céphalorachidien pour être au plus près du cerveau. Il faut poursuivre les recherches pour améliorer ces résultats préliminaires, mais il n’y a aucun doute que ce nouveau traitement prendra une place croissante dans le futur en neuro-oncologie.